[Retro-Giro] - A Cesenatico, sur la route du Pirate

Il y aurait eu forcément de l'émotion aujourd'hui dans la caravane du Giro. Non pas que l'étape, certes vallonnée, offre un spectacle dantesque. Non aujourd'hui, la caravane tournait autour de Cesenatico, lors de cette 12e étape. A 15 km de Cesena, une ville indissociable de Marco Pantani, né ici même et qui aurait connu par cœur ces parcours escarpés autour du port ! Au coeur de deux étapes hommage au grimpeur Italien. Hier, l'étape aurait dû s'achever à Rimini, le lieu ou le vainqueur du Giro et du Tour 1998 a trouvé la mort seul dans sa chambre d'hôtel, d'une overdose de cocaïne, ou d'autre chose. Les fantasmes courent toujours en 2020.

Cela fait seize ans que "Le Pirate" nous a quitté et régulièrement le Giro lui rend hommage. Depuis 2004, une montée est rebaptisé "Cima Pantani" (souvent le Mortirolo par ailleurs). Une montée à chaque fois difficile, à chaque fois décisive ! En 2015, le peloton était arrivé au sommet du Madonna di Campiglio, emprunté pour la dernière fois en 1999, jour de la dernière victoire italienne de Marco Pantani, qui sera exclu dans la foulée pour un taux d'hématocrite trop élevé. 

Si la course au "Maglia Rosa" ne cesse de multiplier les touches d'attention au "Pirate", c'est que Marco Pantani fait parti des derniers "Fuoriclasse" (terme qui désigne un coureur talentueux et disposant d'une grande classe sur le vélo" Italiens. Et qu'il a marqué le Giro de son empreinte. Il y gagne deux étapes en 1994. Mais n'y revient qu'en 1997 et de façon très anonyme (abandon à la 9e étape). Mais entre temps, l'Italien s'est forgé une solide réputation de grimpeur. Podium en 1994, deux étapes en 1995, podium et deux étapes en 1997. Marco Pantani est un coureur capable de lâcher n'importe qui et dont les attaques laissent sur-place tous les meilleurs grimpeurs. Mais il semble trop limité en contre-la-montre pour pouvoir espérer remporter un Grand Tour.

Mais en 1998, tout change. Il débarque sur le Giro. Et cela va être un triomphe. Il remporte la course, en lançant une offensive de loin pour faire sombrer Alex Zülle. Mieux, il résiste à un Pavel Tonkov, en théorie meilleur en chrono, sur l'ultime exercice chronométré, pour remporter son premier grand tour. Le Tour 1998 sera l'apothéose. Pourtant un immense favori semble se dégager en la personne du tenant du titre Jan Ullrich ! Mais Pantani lui reprend du temps dès les Pyrénées. Ullrich est en jaune, mais le coup de grace intervient dans l'étape des Deux-Alpes. Le temps est dantesque, comme les attaques du Pirate, qui s'extirpe dans le Galibier. Il creuse, rattrape et largue un à un les échappés. Derrière, dans la montée finale, Ullrich sombre et perd 10 minutes et son maillot jaune. Pantani remporte le Tour. 

1999 la bascule vers la dérive

En 1999, il roule sur la concurrence sur son Tour National. Avant de se faire exclure à deux jours de l'arrivée. Trop d'hématocrite dans le sang et soupçon de dopage à l'EPO (indétectable à l'époque). Le drame pour le Pirate qui clame au complot et à son innocence. Rien n'y fera. 

C'est la bascule. Le super Marco fait place alors à un coureur plus contrasté ! 28e seulement du Giro 2000 il brille par intermittence sur le Tour 2000. Il y gagne deux étapes mais doit abandonner à la 17e étape, sans avoir déstabilisé vraiment la nouvelle terreur du cyclisme mondial : Lance Armstrong. Ce seront les derniers éclats d'envergures de Marco Pantani. Re-exclu du Giro 2001, après qu'on ai trouvé de l'insuline dans sa chambre lors du fameux Blitz de San-Remo, il ne reviendra plus jamais à son niveau.

S'enchaînent période de dépression, et la dépendance à la cocaïne qui aura raison de lui. Mort seul dans son hôtel de Rimini. Mort seul, après avoir été adulé par tout un pays durant toutes ses années. Quelle triste fin pour Pantani, ce champion qui n'aura jamais digéré son exclusion du Giro 1999. Un coureur dont l'ombre du dopage plane toujours, mais à qui beaucoup ont finalement pardonné, préférant retenir ses envolées en haute montagne, comme on en voit plus aujourd'hui. Un coureur qui n'a laissé personne indifférent. En bien ou mal, à chacun de se faire son opinion.

Etienne GOURSAUD

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