[Rugby] : L'ASM Clermont-Auvergne, au bout du bout

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Le Stade de France vit un moment unique et historique. L'ASM décroche, après douze tentatives en finale, son tout premier bouclier de Brennus. Les Jaunards savourent. Crédit : [L'Equipe].

Huit podiums du Tour sans jamais n’avoir revêtu le mythique maillot jaune, le club de baseball de Chicago qui ne gagne plus en titre pendant 108 ans, Bjorn Borg lauréat de onze Grands Chelems mais quatre fois finaliste de l’US Open, et jamais gagnant. Raymond Poulidor, les Cubs et Iceborg possèdent un point commun avec l’ASM Clermont Auvergne. L’équipe de rugby du centre de la France, deux fois championne nationale, a d’abord été la plus grande championne de la malchance dans l’Hexagone. L’ASM possède une place à part dans la légende de l’Ovalie française pour nombre de raisons. Tout simplement parce qu’il est toujours présent au sommet du rugby depuis 1925, jamais relégué. Aussi pour sa régularité dans l’excellence, aussi dans l’infortune. Douze fois, Clermont est passé tout près du bouclier de Brennus, ne ramenant dans le Puy de Dôme qu’une frustration plus grande d’année en année. Malgré tout, au contraire des Dacquois ou des Brivistes, respectivement finalistes cinq et quatre fois, les Jaunards ont pu, pour leur 99e année d’existence, obtenir le titre de champion de France.

 

A l’aube du Top 14, en 2005, l’ASM est déjà septuple finaliste, des années 1930 au tout début du nouveau millénaire en passant par les années 70. Le club est néanmoins parvenu à décrocher une édition du jeune Challenge Européen (1999), compétition dont il est aujourd’hui recordman de victoires avec les londoniens des Harlequins (3 titres). Passé sous commandement néo-zélandais (Vern Cotter et Joe Schmidt sont arrivés) au départ de la deuxième saison de l’histoire du Top 14, l’ASM grimpe sur le podium, gagne le Challenge et va chercher son ticket pour la finale du championnat. La guigne refait alors surface pour un terrible enchaînement. Clermont chute face au Stade Français en 2007 (18-23) alors qu’il avait mené au score de la 20e à la 77e minute. Elle n’en a pas terminé. La saison suivante, les Auvergnats tombent à Saint-Denis contre le Stade Toulousain (20-26). Enfin, en 2009, les Jaunards s’inclinent en région parisienne au profit de l’USAP (13-22).

Dixième revers lors du dernier match de la saison. Des saisons 2007 à 2009 que l’ASM a pourtant dominées, finissant sur le podium, Brock James meilleur réalisateur, Aurélien Rougerie et Napolioni Nalaga meilleurs marqueurs.

 

Sans avoir changé sa philosophie de jeu, l’équipe s’attaque au Top 14 version 2010 avec toujours le même objectif en tête, ramener le Brennus sur la place de Jaude, théâtre de tant de larmes et de dépit jusqu’alors. Passés tout près de la correctionnelle en demie, terminée en prolongation contre un Toulon de retour au plus haut, les Clermontois obtiennent leur quatrième finale de rang. C’est un remake de la précédente, contre Perpignan. Mais cette fois, l’effectif est trop imprenable. Ledesma, Cudmore, Bonnaire, Vermeulen, Joubert attendent depuis trop longtemps. Parfaitement lancés après l’essai de Nalaga dès la 15e, les Jaunards font la course en tête et ne seront jamais rejoints. Morgan Parra au but, Anthony Floch au drop parachèveront le premier titre de champion de France de l’ASM (19-6). Des dizaines de milliers de personnes sont massées place de Jaude, enfin réunies pour un succès des leurs, accueillis en triomphe, Brennus en main.

 

Désormais libéré de cet immense manque, le club fait preuve d’une faim de loup et se lance à la conquête de tous les trophées possibles, scène européenne comprise. Tandis qu’il s’approche des phases finales en HCup, il délaisse la finale nationale jusqu’en 2015. Entre temps, le stade Marcel-Michelin a vécu ses plus grandes heures, 77 victoires d’affilée en plus de quatre ans pour les Clermontois. Record incontesté. Deuxième de saison régulière en 2014-2015, l’ASM fait donc son retour à Saint-Denis cinq ans après la finale du titre. Sans solution contre un Stade Français costaud et opportuniste au possible (6-12), il échoue pour la onzième fois aux pieds du Brennus. Un an plus tard, la saison se termine à Rennes en demie, après une des plus belles rencontres de l’histoire du Top14 contre le Racing, conclue en prolongations (33-34). Brock James y fait ses adieux et cède le flambeau à Camille Lopez, en plantant un fantastique drop qui avait, eut-on cru, fait la différence à quelques minutes du terme. Le nouveau Clermont des jeunes Iturria, Cancoriet, Raka ou Penaud prendra sa revanche onze mois plus tard, éliminant au même stade les Ciel et Blanc.

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Deuxième victoire finale pour Clermont en Top 14, face à Toulon en 2017. Crédit : [VarMatin].

Finaliste de l’exercice 2016-2017, l’ASM ne laisse pas passer sa chance et, à l’aide d’un fantastique essai d’entrée, de la brillante charnière, et d’une énorme défense, lève une seconde fois le Bouclier de Brennus. Comme son prédécesseur Vern Cotter, Franck Azéma entre dans le gotha des entraîneurs clermontois titrés. L’ancien trois-quart et ses hommes éprouveront quelques difficultés la saison suivante (9e), avant de parfaitement rebondir en s’adjugeant un troisième Challenge Européen et se qualifiant pour la quatorzième finale de son histoire. Contre l’incroyable Stade Toulousain version 2019, avec sa boule de flipper Cheslin Kolbe, son énorme pack et un jeu de main à son apogée, Clermont fait très bonne figure mais échoue pour six points (18-24). Peut-être plus dans ses meilleures années, Morgan Parra avait pourtant cruellement manqué ce soir-là. A la suite de ce douzième revers final, l’ASM achève une partie de sa transition, marquée par les arrêts ou départs de Thomas Domingo, Aurélien Rougerie, Benjamin Kayser ou Damien Chouly.

C’est sans aucun doute par la qualité de son effectif, sa régularité hors pair et son immense qualité de rebond à toute épreuve, que Clermont a autant brillé durant les quinze années d’existence du Top 14. Après avoir vaincu la malédiction du Brennus en 2010, l’ASM a trouvé en la Champions Cup une nouvelle infortune à combattre. Contre Toulon (2013, 2015) et les Saracens (2017), les Jaunards sont restés bloqués en finale, tombant toujours du mauvais côté. Mais comment ne pas avoir confiance en un club aussi structuré et sain que celui-ci. Alors oui, la place de Jaude va peut-être encore verser quelques larmes. Mais on ne dit pas de quoi…

Mathéo RONDEAU

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