Eric Schneider, l'espoir fait vivre

 

La vie tient parfois à peu de choses. Eric Schneider le sait et le dit haut et fort, lui qui est passé tout près de la mort il y a vingt ans et qui a bien failli voir le sort continuer de s’acharner sur les siens, avec la maladie de son fils plus récemment. Mais l’homme est un être robuste, qui sait se relever après avoir encaissé les coups. C’est ce qu’Eric fait avec brio depuis plusieurs années, désormais. A 49 ans, il enchaîne les performances en course à pied et s’occupe d’une formidable association, guériduncancer, qui se charge, à son niveau, d’améliorer les conditions d’hospitalisation des enfants. Voici le portrait d’un homme qui s'estime messager de l'espoir et qui impose le respect.

 

La fulgurante maladie et le renouveau

 

C’est donc en 1999, à 28 ans que la vie d’Eric Schneider bascule. A l’époque, il est déjà « sportif amateur mais vraiment sportif dans l’âme », notamment dans les disciplines collectives. Au fil des mois, « une grande fatigue » s’installe. Le diagnostic arrive après de nombreux examens : « on me dit que j’ai un cancer dans la région du médiastin, entre le cœur et le poumon. Le cancer est fulgurant ». S’en suivent « trois arrêts cardiaques, à la hôpital heureusement, en réanimation de suite, dès ma prise en charge. Les médecins avaient anticipé ce qui allait m’arriver ». Et il ne le cache pas, « c’est ce qui m’a sauvé la vie, vraiment ». Tous ces événements s’enchaînent à une vitesse effrayante, « entre mai et septembre 1999 ».

 

Surtout que le calvaire n’est pas terminé. « J’ai fait une embolie cérébrale, c’est-à-dire que j’étais paralysé de tout le côté droit. Schématiquement, j’ai du réapprendre à respirer avec un poumon qui ne fonctionnait plus à cause de la tumeur et ensuite réapprendre à marcher malgré la perte de poids et l’embolie cérébrale ». Eric, loin d’être résigné et accablé, veut immédiatement reprendre le cours de sa vie, tout en sachant qu’elle ne sera plus jamais la même. « Le sport est revenu très rapidement. Au bout d’un mois de kiné, je voulais déjà recommencer à courir ». Le sport oui, mais plus n’importe lesquels. « J’ai commencé par la course à pied tout simplement parce que les sports que je faisais avant m’étaient dorénavant interdits ». Le renouveau d’Eric passe donc d’abord par quelques contraintes.

 

Deuxième combat et paris fous 

Avec Laure, sa femme, ils fondent une famille, et la naissance de leur fils Téo semble être la validation d’un retour à une vie normale. Une vie qu’Eric voit, arrivée la quarantaine, un peu moins individualiste : « en gros, à 40 ans, j’ai fait un bilan de ma vie, avant que Téo soit malade, et j’avais décidé de donner un autre sens à ma vie et d’aider un peu plus les autres ». C’est alors qu’il contacte l’hôpital Gustave Roussy, à Villejuif, celui dans lequel il a été pris en charge en 1999, afin d’évoquer un pari un peu fou : « je leur ai dit : voilà, vous m’avez sauvé de tout ça, j’aimerai venir vers vous, en courant, puisque j’ai eu la chance de reprendre le sport. Et symboliquement, venir pour parler d’espoir pour les autres ». A l’hôpital, on se dit pourquoi pas, mais on découvre alors un petit détail intéressant : « Gustave Roussy ne savait pas que j’habitais à Marseille, donc j’ai dit que pour ce faire j’allais devoir courir de Marseille à Paris, soit une distance de dix-huit marathons ».

Cependant, alors qu’Eric « montait ce projet là en termes de logistique, c’est Téo qui est tombé malade ».

C’est une nouvelle épreuve à surmonter, mais peut-être aussi une raison de plus de mener à bien ce pari fou. « J’ai attendu un an et demi et je l’ai réalisé en 2014 ». C’était donc parti pour dix-huit jours de course intensifs, à travers l’Hexagone, toujours aussi positif dans l’état d’esprit : « J’ai fait ça pendant mes trois semaines de congés payés. Donc je me disais : tu ne vas pas te plaindre, tu es payé à courir ! ».

Il s’était parfaitement préparé pour avoir la caisse sur les dix-huit marathons, avec douze séances de course par semaine et ce pendant trois semaines, de manière à habituer le corps à la performance future, si bien qu’il « cumulai[t] environ 200 kilomètres de course par semaine ». Et ainsi, lorsqu’on lui demande si cela fut dur sur le plan physique, il répond : « ça a été dur, mais pas tant que ça. C’est surtout une histoire de mental ».

 

Pas étonnant donc qu’il ait re-signé pour une nouvelle course folle, en 2016, entre Nice et Marseille, faite de six marathons consécutifs et avec l’entrainement conséquent auparavant.

De la suite dans les idées...

Cette année, Eric décide de s’inscrire pour le fameux marathon Nice-Cannes. Les 42,195 bornes, ça le connaît, puisqu’il s’était déjà inscrit à de nombreux marathons organisés depuis 1999. « Mais cette année, je voulais prendre la qualif pour les championnats de France, ce qui a été fait ». Il court le Nice-Cannes en 3h34’35’’ dans des conditions dantesques. En plus de cela, il aimerait « aussi doubler avec le semi-marathon, c’est-à-dire me qualifier aussi pour les championnats de France en semi. Désormais, à 49 ans, je passe Master 3 selon les nouvelles règles, et il faut donc faire moins de 1h27, donc 4’07’’ au kilomètre, il faut commencer à courir un peu vite. L’objectif de l’année 2020, c’est championnat de France de semi-marathon et marathon ».

 

Mais le but ultime d’Eric Schneider est bien de « dire aux sportifs professionnels que faire du sport est juste un privilège et qu’il faut en être conscient. Et après, si je peux parler d’espoir pour les autres, c’est-à-dire : peu importe ce qui vous arrive dans la vie, on peut survivre à trois arrêts cardiaques, on peut réapprendre à marcher, à respirer, et courir aux championnats de France de marathon. Je trouve que la symbolique est belle ».

 

...et une association pleine de projets

Gueriduncancer, l’association d’Eric, a cinq ans depuis quelques semaines. Et Eric d’enchaîner : « de base, je ne pars de rien, je n’ai aucune connaissance dans les médias, sauf que le Marseille-Paris a été relayé et c’est ce qui nous a énormément aidé. On a récolté, en cinq ans, 308 000 euros, ce qui n’est pas rien. Bien sûr, il y a plus, mais moi au départ, pour mon Marseille-Paris, j’espérais obtenir 500 euros. Et nous ça nous aide à aider les autres ». Des fonds qui sont destinés à financer du matériel ou de la recherche, sur trois pôles différents, à savoir Marseille-La Timone, Léon Bérard à Lyon et Gustave Roussy à Villejuif. Des fonds qui sont également voués à améliorer les conditions hospitalières des enfants.

Aussi, l’association pense aux familles dans leur intégralité, en les envoyant en vacances avec parents et frères et sœurs si il y a. Eric le sait, « à travers la maladie, il y a un des deux parents qui ne travaille plus, donc souvent on ne va plus en vacances, c’est-à-dire qu’on subit la maladie ». En 2020, il espère pouvoir envoyer des familles en Corse.

 

Enfin, quand on lui demande si il considère que la vie lui a donné une seconde chance, il appuie sur le terme de privilégié, et justifie : « En entendant mon histoire, on pourrait me dire : il n’a vraiment pas de chance ce mec. Moi je considère que j’ai énormément de chance. J’ai eu la chance d’avoir eu une nouvelle vie et j’ai surtout la chance d’avoir encore mon fils à côté de moi. Je suis vraiment chanceux. En théorie, dans la vie, on est juste des privilégiés et on ne s’en rend pas compte. Mais c’est humain, et heureusement que l’on vit avec un peu d’insouciance ».

Il débouche sur son principal message, « faire du sport, c’est juste un privilège », avant de conclure : « Ne serait-ce que d’écouter ce message là, peut-être qu’une personne se battra une journée de plus. Et puis on ne sait pas de quoi demain est fait ensuite ».

 

En 1999, à trois reprises, le cœur d’Eric Schneider s’est arrêté. Aujourd’hui, il a plus que jamais un cœur d’or.

Mathéo RONDEAU

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J
Tres bon et beau sujet <br /> Bravo encore pour ce bel article
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R
Bel exemple, respect Eric!
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