15 Mai 2020
Tout juste prolongé jusqu’en 2022 par sa formation, UAE Team Emirates, Diego Ulissi, le coureur italien de 30 ans, a eu la gentillesse de bien vouloir répondre à nos questions concernant la relation de celui qui a levé les bras à six reprises sur le Giro avec son Tour national. Le sprinteur (vainqueur d’un sprint massif sur le Giro 2015), puncheur (lauréat du GP de Montréal 2017, 3e de la Flèche 2018), grimpeur (6e de la 1ère ascension de Jebel Hafeet sur l’UAE Tour en février dernier, vainqueur au sommet du Montecopiolo sur le Giro 2014), attaché à son équipe, ex-Lampre, depuis qu’il a débuté chez les pros, nous dévoile ses joies, ses peines sur les routes Transalpines, et évoque la suite de sa carrière.
« Que représente le Giro en Italie ?
Le Giro est un véritable phénomène culturel en Italie. Cela représente énormément de choses. La beauté du pays, les différentes régions, la passion de tout un peuple. C’est une fête pour notre magnifique pays.
- Sur vos 7 Tours d’Italie, vous avez pris à quatre reprises le départ depuis l’étranger (Israël, Pays-Bas, Irlande, Danemark). Que cela change-t-il ?
Cela rallonge un peu la course. Vous arrivez plus tôt que d’habitude avant le Grand Départ et il y a généralement un jour de repos pendant que nous effectuons la transition vers l’Italie. Cela ajoute aussi une saveur différente à la course puisque cela apporte de nouveaux spectateurs et fans à la course. Si c’est bien réalisé, c’est une superbe idée.
- De laquelle de vos six victoires d’étapes sur le Giro êtes-vous le plus fier ?
La victoire dont je suis le plus heureux, c’était en 2015, à Fiuggi. C’était une très longue étape (264km), sept heures et demie de course. C’était magnifique de gagner une si belle étape (il s’impose dans un sprint de costauds, devant Lobato et Gerrans).
- Échangeriez-vous vos succès d’étapes contre le fait de revêtir le maillot rose pour quelques jours sur le Giro ?
Non je ne les échangerais pas contre le maillot rose. Les victoires restent pour toujours. Peut-être qu’à l’avenir ce serait bien d’aller chercher le maillot rose, mais avant je souhaite remporter d’autres étapes.
- Quel est le jour où vous avez le plus regretté d’avoir manqué l’échappée ?
C’est arrivé beaucoup de fois ! Mais c’est vraiment très difficile de prendre la bonne échappée, c’est très souvent une question de chance. Il y a aussi eu des jours où j’ai renoncé à sortir devant parce que je devais venir en aide à certains coéquipiers.
- Vous êtes actuellement le quatrième coureur en activité (derrière Cavendish, Nibali et Greipel) avec le plus de victoires d’étapes sur le Giro. Cela représente-t-il quelque chose pour vous ?
Non, je ne suis pas un coureur qui regarde beaucoup les statistiques, j’essaie juste de m’améliorer. Mais je suis assurément heureux de ce que j’ai réalisé ces dernières années sur le Giro, dans cette course si prestigieuse.
- Quel est votre pire souvenir de journée passée sur le vélo lors d’un Tour d’Italie ?
L’étape la plus difficile, c’était lors de mon premier Tour d’Italie, en 2011, avec l’arrivée à Gardeccia/Val di Fassa (15e étape, retrouvez le détail en fin d’interview*). J’avais peu d’expérience, et ce fut une très longue journée (230km), avec beaucoup de cols, et j’ai fait une hypoglycémie. Mais deux jours plus tard, j’ai gagné la première étape de ma carrière à Tirano.
- Quel est le col le plus difficile que vous ayez eu à escalader sur le Giro ?
A chaque fois que nous devons franchir le Passo dello Stelvio, c’est très difficile. Nous allons à une altitude très élevée (2758m), il y a peu d’oxygène, les forces commencent à manquer.
- Quelle serait votre étape parfaite sur le Tour d’Italie ?
Les paysages des Dolomites sont merveilleux, c’est même dommage que nous fassions trop d’efforts pour admirer la beauté ! Aussi, nous passons très souvent près de la belle mer italienne, on a tout le temps envie de prendre un bain, mais on ne peut malheureusement pas s’y arrêter.
- Vous avez un physique comparable à celui de Julian Alaphilippe (1,75m et 63kg pour l’Italien, 1,73m et 62kg pour le Français**), des qualités relativement similaires. Lui se voit peut-être un jour coureur de Grands Tours. Et vous ?
Je ne pense pas pouvoir viser un classement général dans l’avenir sur un Grand Tour. Dans les montées, je suis fort, mais dans les longs cols de la troisième semaine, je souffre. Il vaut mieux que je me concentre sur les victoires d’étape.
- Vous comptez à l’heure actuelle une trentaine de succès chez les pros, félicitations, mais quelle est la course que vous rêvez le plus d’accrocher à votre palmarès ?
Merci beaucoup ! Je suis content de ce que j’ai réalisé jusqu’à présent, mais j’ai 30 ans et je pense pouvoir encore m’améliorer sur certains points. Dans les années qui viennent, j’essaierai de devenir un gros concurrent sur les courses d’un jour et sur celles d’une semaine. Mais mon rêve est de remporter un Monument ! »
*
** Selon ProCyclingStats
Mathéo RONDEAU